L’importance donnée à la santé à Taramana

“Le suivi médical de Taramana est essentiel.”

Interview réalisée auprès de Vuthny, médecin interne  et Visal, infirmier à Taramana.

Depuis la création de Taramana en 2005, avant même de démarrer tout programme éducatif, il avait été décidé de mettre l’accent sur l’accès aux soins et à la nutrition; Sous l’impulsion du Dr Jocelyn Dordé, médecin généraliste et Président-Fondateur de l’ONG, un programme de vaccination (tétanos, poliomyélite, ROR, hépatite B) est rapidement mis sur pied ouvert aux enfants et aux familles.

Très vite, les familles reçoivent des sacs de riz tous les mois et les enfants sont bilantés avec visite médicale annuelle, déparasitage intestinal, cures de multivitamines et traitements spécifiques si besoin.. Dans la foulée et dès 2008, une cantine voit le jour offrant un menu équilibré chaque jour à tous les enfants venant étudier dans l’ancien centre Taramana implanté au cœur du bidonville.

 

Afin de diminuer la fréquence des maladies infectieuses touchant les enfants, des cours de sensibilisation sont élaborés et dispensés par l’équipe médicale et les différents infirmiers se succédant au Centre. Tous les mois, les enfants suivent assidûment des sessions leur permettant d’en savoir plus sur l’hygiène corporelle, dentaire, les dangers de l’alcool et du tabac, les drogues, l’intérêt de porter un casque en moto,…Il n’en faut pas plus pour que les gastroentérites aiguës, la gale et les infections cutanées se fassent plus rares avec comme particularité qu’une fois rentré à la maison, ce sont les enfants qui « sensibilisent » leurs parents et aînés. Aussi, les enfants gravitant au Centre reçoivent des cures de multivitamines tous les 2 mois ainsi qu’un comprimé de déparasitage tous les 4 mois. Résultat : des enfants qui grandissent, prennent du poids et ont de meilleurs résultats scolaires à n’en pas douter.

 

Interview à suivre de Vuthny, médecin au Centre Taramana et Visal, infirmier afin qu’ils nous livrent leurs impressions et en quoi la santé est si importante à Taramana

1- Pouvez-vous vous présenter – nous expliquer vos parcours ?

Visal : “Bonjour, je m’appelle Visal, j’ai 34 ans et je travaille à Taramana depuis environ 8 ans. Après avoir fini mes études d’infirmier à l’Université Internationale de Phnom Penh, j’ai travaillé dans des hôpitaux et cliniques et après je suis arrivé à Taramana. Lorsque je ne travaille pas ici, je suis également chanteur !”

Vuthny : “Je m’appelle Vuthny, j’ai 26 ans et je suis un élève de Taramana depuis que j’ai 12 ans. Après 6 ans d’études de médecine, je commence ma 1ère année de spécialité en pédiatrie. En plus de mes études, j’ai donné des cours de français à Phnom Penh à des Cambodgiens et des cours supplémentaires de mathématiques et khmer aux élèves de l’ONG Enfants d’Asie. En parallèle de Taramana, je suis actuellement interne à l’hôpital Kantha Bopha, depuis 3 mois, pendant encore 2 mois.”

 

2- Pouvez-vous nous expliquer vos principales missions à l’infirmerie de Taramana ?

Visal : “Je prends soin des enfants et de leurs familles et j’apporte parfois mon aide pour des activités extérieures.

Je commande la nourriture pour la cantine et j’effectue les premiers soins. Si les enfants ont des problèmes médicaux ou s’ils ont besoin de parler, ils viennent me voir.”

Vuthny : “Je suis là quand les enfants de Taramana ont besoin et j’essaie de les sensibiliser à différentes thématiques de santé, notamment l’hygiène, pour leur éviter d’avoir des maladies dans la vie quotidienne. 

Ça me fait vraiment plaisir de venir à Taramana car je suis un ancien élève du centre et je lui dois beaucoup.”

3- Pour vous, en quoi le suivi médical des élèves de Taramana est-il important ?

Visal : “Le suivi médical de Taramana est essentiel car, pour la plupart, les familles des enfants n’ont pas assez de temps ni d’argent pour aller à l’hôpital.”

Vuthny : “la santé est importante car cela permet aux enfants de bien étudier, d’apprendre plus facilement : la santé physique influe sur leurs capacités mentales : s’ils sont malades, ils ne pourront pas aller à l’école.

J’apporte mon aide aux familles qui n’ont pas le temps de s’occuper de leurs enfants au niveau médical.”

 

4- Qu’y-a-t-il de prévu comme sensibilisation pour le mois de mai, ou dans les prochains mois ? Par exemple, sensibilisation aux dangers de la drogue, du tabac etc…

Visal : “Étant donné qu’en ce moment débute la saison des pluies, je vais mettre en place une présentation sur les dangers de la dengue et des moustiques, par qui la dengue est transmise. Lors des années précédentes, je leur ai fait part de plusieurs sensibilisations : dangers du tabac, des jeux vidéos, importance de l’hygiène en général, ou encore prévention autour des morsures d’animaux, autrement dit de la rage.”

Vuthny : “Comme Visal l’a précisé, étant donné que la saison des pluies arrive plus tôt que prévu cette année, nous allons mettre en place une présentation sur la dengue et ses dangers. L’objectif est de sensibiliser les enfants en leur expliquant quels sont les moyens préventifs à mettre en place afin d’éviter de se faire piquer, tels que mettre des vêtements longs le soir, ou encore ne pas rester dans un endroit sombre et humide, où stagnent les moustiques.

J’aimerais également mettre en place une présentation afin de les sensibiliser sur l’importance de la sécurité extérieure, en insistant sur le fait de porter un casque ou faire attention en traversant, par exemple.”

 

6- Quelle est votre vision de la santé au Cambodge, en règle générale ?

Visal : “La santé en général au Cambodge n’est ni bonne, ni mauvaise, mais malheureusement, elle n’est pas la même pour tout le monde car l’accès y est compliqué. 

Par exemple, ici à Boeng Salang, les familles préfèrent avoir de quoi manger, plutôt qu’une bonne santé. 70%  des enfants se brossent les dents. Heureusement, la plupart des sensibilisations que nous effectuons au Centre sont efficaces. En l’occurrence, celle sur le brossage des dents l’a été : avant les enfants ne se lavaient pas les dents, maintenant ils ont pris le réflexe de le faire, grâce au déjeuner à la cantine où ils doivent forcément passer par l’étape brossage de dents.

L’avantage à Taramana est le suivi médical que nous apportons, même pour les anciens élèves ; tous les anciens de Taramana peuvent venir, y compris leurs familles. Mon souhait pour l’avenir est que les Cambodgiens aient tous une bonne santé.”

Vuthny : “Selon moi, le système de santé cambodgien reste limité étant donné que nous sommes dans un pays en voie de développement. En effet, beaucoup de personnes pauvres n’ont pas assez de moyens pour pouvoir bénéficier de soins médicaux facilement. Elles se retrouvent donc sans pouvoir être soignées et donc sont vite malades. Certaines inégalités persistent, par exemple les fonctionnaires peuvent avoir accès aux soins gratuitement. En revanche, je trouve que le Cambodge permet une bonne qualité de soins à l’hôpital. Mon souhait serait que tout le monde ait accès aux soins gratuitement, comme à l’hôpital.“

7- En quoi les ONGs ont un rôle important au niveau de la santé ?

Visal : “Les ONGs sont essentielles au niveau de l’accès à la santé pour plusieurs points: 

  • Accès gratuit à la santé
  • Bonne qualité des services et de la médecine

En revanche, je pense qu’il devrait y avoir plus de personnel médical dans les ONG, pour apporter de l’aide aux familles dans le besoin.”

Vuthny :  “Taramana permet aux enfants et aux familles de prendre conscience de l’importance de la santé, à travers différentes actions tels que :

  • le suivi vaccinal ; j’ai été vacciné contre l’hépathite B, sans Taramana cela n’aurait pas été possible
  • L’hygiène dentaire :  les enfants ont pris de bons réflexes quotidiens
  • L’apport  des connaissances en matière de santé

Si les enfants sont au courant des dangers, ils peuvent limiter leur taux d’hospitalisation et de maladie. Grâce à Taramana, les enfants ont accès à l’éducation, ce qui leur permet d’avoir accès à un bon métier. C’est notamment mon cas ; grâce à Taramana, je vais pouvoir devenir médecin.”

8- Quels sont, selon vous, les points positifs et négatifs des ONGs, au niveau médical ?

Visal : Le point positif est le fait que nous aidons les gens. Le point négatif est qu’il n’y a pas beaucoup de moyens.”

Vuthny : “Tout d’abord, pour moi, il y a davantage de points positifs que négatifs :

  • l’ONG peut soulager les hôpitaux 
  • Elle aide les enfants et leurs familles
  • Elle permet aux enfants de s’évader et d’être occupés
  • Elle permet d’avoir accès à des soins médicaux gratuitement
  • D’avoir accès à un repas équilibré avec des légumes
  • De bénéficier d’une procédure vaccinale

Le point négatif principal est le manque de moyens et de personnel. A Taramana, par exemple, il faudrait que quelqu’un soit présent le matin.”

9- Quelles seraient pour vous les 3 qualités pour travailler dans une ONG au niveau médical ?

Visal :

  • “L’honnêteté
  • Être investi(e) dans son travail
  • La capacité d’adaptation étant donné que c’est un environnement particulier, cela n’a rien à voir avec une entreprise ou clinique, dite “normale”

 Vuthny :

  • “Être humain
  • Sociable
  • Patient”

10- Selon vous, qu’est-ce que l’on pourrait changer dans le système de santé du Cambodge ?

Visal :

  • “Rendre + accessible la santé en mettant en place + de médicaments gratuits
  • Créer + d’hôpitaux et de personnel
  • Sensibiliser davantage les enfants à l’importance de l’hygiène etc…”

Vuthny :

  • “Avoir accès à l’hôpital gratuitement
  • Avoir + de personnel médical
  • Sensibiliser davantage les Cambodgiens aux différents dangers, car cela leur permettrait de réduire les soins, etc”   

 

Orkun chraen Vuthny et Visal✨